Le «bain de feu» est la fête plus caractéristique des Pà Then, une ethnie minoritaire habitant la province montagneuse de Tuyên Quang (au Nord). Une fête nocturne insolite par laquelle les montagnards expriment leur vœu d’avoir la force de la vie.
Pour les Pà Then, la nuit du 16e jour du 10e mois lunaire est vraiment sacrée. La moisson étant rentrée, c’est le moment où ils consacrent corps et âme au Génie de feu qu’ils vénèrent. Car, «le feu apporte bonheur et santé», disent-ils. Et de faire de cette fête nocturne, la plus importante de l’année, dans l’espoir d’obtenir une bonne récolte de riz, de repousser les maladies et de pouvoir vivre en paix et en prospérité.
Le «bain de feu» commence à la tombée de la nuit, sous la guidance d’un sorcier, le seul à pouvoir s’entretenir avec l’autre monde. Les villageois se rassemblent au milieu d’un vaste terrain où crépite un gigantesque feu de bois. A côté, se dresse un autel agrémenté de bougies rouges et rempli d’offrandes, dont une tête de porc et un poulet bouillis à l’eau, un bol de riz parfumé, un jarre d’alcool de riz gluant…
Entouré d’un groupe d’adolescents sélectionnés auparavant parmi les villageois, le sorcier fait le rite dit de la Permission du Génie de feu. Il brûle trois baguettes d’encens, des plantes dans le brûle-parfum sur l’autel; puis trois autres pour planter dans le sol. Ensuite, prenant en main un bâtonnet de bambou, le sorcier frappe sur le Pando, un instrument de musique traditionnel des montagnards, tout en murmurant des prières mystérieuses. «Le maître est en train d’invoquer le Génie du feu, en exprimant les vœux éternels des montagnards : une bonne récolte, une vie heureuse et une bonne santé pour tout le monde», explique un vieillard, ajoutant que le Génie de feu est ainsi invité à venir s’incarner dans le corps de ces adolescents représentant les Pà Then, leur donnant une force surnaturelle.
Un quart d’heure s’est passé dans les sons de musique et de prières. Par miracle, les adolescents se voient dodeliner de la tête, les yeux étant brillants. «Le Génie rentre», chuchote-t-on. Une fois la permission accordée, sur un signe de tête du sorcier, les adolescents en costume de fête s’avancent pour former un cercle autour du feu crépitant. Les prières continuent. Ces derniers se mettent à danser, pieds nus, au rythme accéléré du Pando. D’un coup, l’un d’entre eux se lance dans le feu ardent, se courbe, prend à pleines mains des braises rougeoyantes pour s’en asperger la tête et le corps. L’un après l’autre, les adolescents se baignent ainsi dans le feu, le visage rougissant et enthousiaste. Soudain, avec les pieds, ils éparpillent les braises de toutes parts, formant une «pluie d’étoiles» qui tombe sur la foule fortement exaltée.
Ainsi de suite pendant une heure environ. L’obscurité semble s’être évanouie de l’endroit. Et les danseurs et les spectateurs, vivement réchauffés, semblent apercevoir la présence invisible de leur Génie tutélaire. Le bain de feu se termine dans une atmosphère spectaculaire. Reste une chose inexplicable: «aucun cas de brûlure n’a été signalé jusqu’ici», selon le sorcier célébrant.

Entouré d’adolescents, un bâtonnet de bambou en main, le sorcier frappe sur le Pando, un instrument de musique traditionnel des Pà Then.

Le plateau d’offrandes comprend une tête de porc et un poulet bouillis à l’eau, un bol de riz, cinq verres d’alcool et une bouteille d’alcool de riz gluant.

Le sorcier se met à murmurer des prières mystérieuses tout en frappant sur le Pando et brimbalant le Pasan.
Source: NDEL
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